Améliorer la gestion de l’azote dans la région de l’Atlantique
Application fractionnée d’engrais azoté
David Burton, Université Dalhousie, et lkechukwu Agomoh, Agriculture et Agroalimentaire Canada
L’azote (N) est un nutriment essentiel à la croissance des cultures, mais il est difficile à gérer en raison de pertes qui peuvent nuire à l’environnement et réduire l’efficacité agricole. Dans les provinces de l’Atlantique, une région englobant des conditions climatiques et des systèmes de culture variés, il est primordial d’optimiser l’utilisation de l’azote. L’application fractionnée d’engrais azotés constitue une stratégie éprouvée qui permet de maintenir les rendements avec un apport en N réduit, d’utiliser l’azote avec un maximum d’efficacité, de réduire les pertes dans l’environnement et de soutenir des pratiques agricoles durables.
Pourquoi l’application fractionnée est-elle avantageuse?
Lorsque tout l’engrais azoté est appliqué avant ou pendant l’ensemencement, l’azote reste dans le sol durant trois à quatre semaines avant que les plantes puissent l’absorber. S’il pleut pendant cette période, ce qui est souvent le cas dans la région de l’Atlantique, il risque fort d’y avoir perte de N.
Avantages de l’application fractionnée de l’azote
L’application fractionnée de l’azote consiste à répartir la quantité totale d’engrais azoté sur au moins deux applications pendant la saison de croissance, plutôt que de l’épandre en une seule fois à l’étape de l’ensemencement. Cette approche présente plusieurs avantages :
- Accroissement de l’efficacité de l’engrais azoté : Si les applications de N sont harmonisées avec les profils d’absorption des végétaux, l’azote est utilisé plus efficacement, ce qui réduit la quantité de N nécessaire et les probabilités qu’un excès d’azote dans le sol soit perdu dans l’environnement.
- Engrais à base de nitrate : L’application fractionnée est l’une des seules approches de gestion qui permettent l’utilisation optimale de sources d’engrais azoté à base de nitrate.
- Réduction du lessivage du nitrate : Si l’azote est disponible à peu près au moment où les cultures peuvent l’absorber, la quantité de nitrate qui s’accumule dans le sol s’en trouve réduite, ce qui limite les risques de lessivage dans la nappe souterraine.
- Réduction des émissions d’oxyde nitreux (N2O) : En limitant l’accumulation d’excès de nitrate, l’application fractionnée d’engrais azoté peut entraver la production de N20 durant la dénitrification.
- Amélioration des rendements et de la qualité : Une disponibilité optimale de N se traduit par une meilleure croissance, des rendements soutenus et des denrées de meilleure qualité.
- Économies : Une utilisation plus efficace de l’engrais azoté réduit la quantité d’engrais nécessaire, ce qui engendre des économies.
Quand les applications fractionnées devraient-elles avoir lieu?
Les stratégies d’application fractionnée de N prévoient généralement l’épandage d’une proportion allant jusqu’à 40 % de l’engrais azoté au moment de l’ensemencement et des 60 % restants plus tard dans la saison de croissance, lorsque la plante amorce sa période d’absorption active de N. La méthode d’application de l’engrais azoté en postlevée dépend du type de culture. Pour les cultures en rangs, les producteurs ont souvent la possibilité d’appliquer l’engrais en bande entre les rangs. Il vaut mieux injecter l’engrais dans le sol pour réduire la perte de NH3 issu de sources de N à base d’ammonium. Il est aussi possible d’appliquer l’engrais azoté en postlevée dans le cadre d’un traitement foliaire. Plusieurs produits de N se prêtent à une application sur les feuilles.
L’application fractionnée comporte un autre avantage : elle permet aux producteurs d’adapter leur dose de N en fonction de la saison de croissance. Ils peuvent commencer par appliquer la dose de N nécessaire pour soutenir la culture au cours d’une année moyenne et ajuster ensuite l’application fractionnée pour tenir compte des conditions climatiques observées au début de la saison. Au cours d’une bonne année, une quantité supplémentaire de N peut être ajoutée pour tirer parti d’un potentiel de rendement accru. Au cours d’une mauvaise année, la dose de N peut être réduite pour refléter la diminution du rendement attendu.
Avant l’ensemencement : Comme les semailles peuvent être une période très chargée, les producteurs profitent souvent de l’étape de la préparation des champs pour épandre des sources d’azote avec d’autres engrais requis en de plus grandes quantités, comme de l’engrais à base de potassium. C’est aussi pendant cette période préparatoire que les engrais azotés épandus à la volée peuvent être incorporés au sol afin de prévenir la perte d’ammoniac. Il faut absolument protéger les sources de N appliquées à ce stade pour limiter les pertes subies avant la période de demande maximale en N des plantes. Pour réduire les coûts, songez à utiliser des sources de N protégé qui ne deviendront disponibles que de six à huit semaines après l’application (urée traitée avec deux types d’inhibiteurs).
Pendant l’ensemencement : Les producteurs peuvent déposer des nutriments avec les semences ou les appliquer en bande, habituellement à une distance de 2 po à côté et en dessous des semences. Les quantités et les formes de N ajoutées à ce stade ne doivent pas causer de dommages aux semences. Voici quelques éléments à retenir :
- De petites quantités (25 lb/acre) de phosphate de monoammonium ou d’hydrogénophosphate de diammonium favorisent l’émergence des végétaux et l’implantation précoce des semis.
- De petites quantités (25 lb/acre) d’engrais azoté à base de nitrate, par exemple des produits à base de nitrate de calcium ou de nitrate d’ammonium, peuvent être appliquées en bande.
- Les produits à base d’ammonium appliqués pendant l’ensemencement devraient contenir un inhibiteur de nitrification.
- L’application de produits à base d’urée traités avec deux inhibiteurs se fait en bande.
En postlevée : L’épandage d’engrais en postlevée permet de reporter l’application de N jusqu’à la période où les végétaux ont le plus besoin de nutriments et d’ajuster les doses de N pour refléter le potentiel de rendement en fonction des conditions de croissance observées en début de saison. Le recours à des produits traités avec des inhibiteurs de nitrification ou enrobés de polymères pourrait ne pas être souhaitable à ce stade, car le ralentissement de la nitrification pourrait faire en sorte que l’azote devienne disponible seulement après la période d’absorption optimale par les végétaux. Voici quelques éléments à retenir :
- L’application de sources de N non protégé se fait en bande. L’urée non protégée devrait toujours être placée dans le sol de manière à limiter la volatilisation de l’ammoniac.
- L’application d’urée traitée avec un inhibiteur d’uréase ou de nitrate d’ammonium et d’urée se fait à la volée ou en surface.
- Les produits à base d’urée ou de nitrate d’ammonium et d’urée sont appliqués sur les feuilles. L’épandage direct d’une source de N à base d’urée en petites quantités permet d’appliquer directement l’azote sur la culture. Cette pratique pourrait être avantageuse en période de sécheresse, lorsqu’il y a peu de percolation d’eau du sol vers les végétaux. Ces engrais peuvent être appliqués avec d’autres produits agrochimiques tels que des fongicides pour limiter le nombre de sorties au champ.


Q : Quand la culture est-elle le plus susceptible d’absorber l’engrais azoté?
R : L’application fractionnée permet aux producteurs d’épandre de l’azote au moment où la plante en a besoin, ce qui améliore les résultats agronomiques et environnementaux.


Fruit d’une nouvelle approche face à l’innovation agricole au Canada, le Laboratoire vivant du Nouveau-Brunswick permet à des agriculteurs, à des scientifiques et à d’autres collaborateurs d’unir leurs efforts pour élaborer et mettre à l’essai des pratiques agricoles novatrices dans des conditions réelles. Il fait partie d’un réseau pancanadien de laboratoires vivants créés dans le cadre du programme Solutions agricoles pour le climat – Laboratoires vivants, qui est financé et soutenu par Agriculture et Agroalimentaire Canada. Chaque projet vise à accélérer la conception et l’adoption de solutions durables à la ferme pour contrer les effets des changements climatiques.